jeudi 5 janvier 2017

La laïcité est nécessairement chrétienne

Depuis plusieurs années la question de la place du religieux dans l'espace public alimente les discussions.

La thèse la plus propagée à notre époque est qu'on doit expurger le plus possible, sinon entièrement, les références à Dieu de la politique et même de le sphère sociale. On a qu'à se rappeler, récemment, les âpres luttes au sujet du crucifix à l'assemblée nationale ou la question de la prière d'ouverture des assemblées municipales, au nom de la laïcité.

Dans un premier temps, à la révolution française, en plus de la royauté, c'est le christianisme qu'il s'agit d'éradiquer et, chez nous, c'est surtout depuis les année 60 et la révolution tranquille que cette lutte ouvertement anti-chrétienne s'est engagée.

Dernièrement, après des années de promotion active d'une immigration massivement non-chrétienne, de l'augmentation significative de la présence de ces cultures non-chrétiennes dans nos sociétés occidentales, ce débat de la place du religieux dans l'espace public s'est retrouvé d'actualité et a pris une nouvelle tournure.
Alors qu'autrefois, quand on parlait de Dieu, quand on parlait de religion, il s'agissait toujours implicitement du christianisme, aujourd'hui, cependant, quand on parle de Dieu ou des religions, ce qui est entendu implicitement est que toutes les religions se valent (elles ont toutes la même valeur) et\ou qu'elles ont toutes la même signification (le même "message"). Nous en parlons donc toujours en les mettant toutes au même niveau, dans le "même panier".

Or, cette prémisse constante et jamais remise en question est la source d'une confusion qui ne peut que résulter en un échec de cette réflexion sur la place du religieux dans la société.

Les religions n'ont pas toutes la même signification et c'est à cause d'une culture relativiste que nous ne sommes plus capable, aujourd'hui, de poser un jugement de valeur sur chacune d'elles.
En plus du problème de notre culture relativiste, il y a aussi la fait que, combattant depuis longtemps contre la présence du christianisme à tous les niveaux de la société, nous somme en plus devenu incapable de reconnaître l'enracinement chrétien des valeurs prétendument "laïques" et "universelles" auxquelles nous affirmons toujours tenir fermement.

Séparation de l'Église et de l'état.

À titre d'exemple, je prendrais cette fameuse "laïcité" qui nous fait dire que nous devons débarrasser la sphère publique de ses références chrétiennes.

Eh bien, ce qu'il faut dire est que la notion selon laquelle le politique a un objet propre, distinct, du religieux et qu'il doit avoir sa propre autonomie par rapport à la religion et que l'autorité politique a sa propre légitimité, distincte, encore une fois, de celle des "prêtres", a son origine en Jésus-Christ.
C'est lui qui a dit, aux pharisiens qui lui posaient la question : "Doit-on payer l'impôt à César ?", "Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu".
Jésus, en procès devant Pilate qui lui dit : "Alors, tu ne me réponds pas ? Ne sais-tu pas que j'ai l'autorité de te relâcher ou de te faire crucifier ?" et Jésus lui répond "Tu n'aurais sur moi aucune autorité sur moi si elle ne t'avais été donnée d'en haut.". Par ces paroles, Jésus reconnaît l'autorité de Pilate.

Il y a d'autres exemples de paroles bibliques qui fondent, pour les chrétiens, cette distinction entre l'autorité politique et l'autorité religieuse et la reconnaissance de la valeur distincte des deux. Par ailleurs, il convient de noter que, historiquement, la notion de "séparation" de l'Église et de l'état avait pour but de protéger l'Église des intrusions du pouvoir politique et non l'inverse.
Jésus, encore une fois, a été très clair : "Mon royaume n'est pas de ce monde". Le règne de Jésus n'est pas un règne politique par sa nature.

Ce que je veux souligner, ici, c'est que cette notion de séparation de l'Église et de l'état, cette reconnaissance de la distinction et de l'autonomie des deux sphères d'autorité (religieuse et politique) est née et s'est développée dans le christianisme et nulle part ailleurs.

À aucune époque et dans aucune autre société ce concept n'a existé et il n'existe pas non plus dans aucune autre religion.

Alors, lorsque nous parlons de "laïcité", nous parlons en chrétiens, que nous le sachions ou non, que nous l'admettions ou non. Lorsque des personnes de traditions religieuses non-chrétiennes nous entendent parler, nous les occidentaux laïcistes, ils disent : "Ils prêchent leur religion chrétienne", et ils ont raison. Le problème c'est que nous ne nous en rendons même pas compte.

Égalité de l'homme et de la femme.

Ce que je viens d'expliquer au sujet de la soi-disant "laïcité" est aussi vrai par rapport à cette autre notion qu'est l'égalité de l'homme et de la femme.
Évidemment, dans le contexte de notre culture actuelle, cela peut être plus difficile à percevoir.

La principale objection qu'on fera est que dans l'Église Catholique, étant donné que les femmes n'ont pas "droit" à l'ordination, il y a une discrimination fondamentale qui nie de fait cette reconnaissance d'égalité.
Ma réponse à cette objection (que je veux garder courte, qui ne satisfera probablement pas ceux qui s'objectent) est que notre société nous a habitué à une conception marxiste de l'égalité, une vision de l'égalité qui nie les différences et la complémentarité. Nous avons effectivement été habitués à tout regarder sous l'angle du pouvoir.
Or, dans l'Église, ce qui est ultime c'est la sainteté. Ce qui est le plus grand c'est l'union à Dieu que nous donne le baptême.
Le sacerdoce des prêtres, existe pour servir la croissance dans la sainteté des fidèles. La hiérarchie visible de l'institution terrestre n'existera pas au Ciel et du point de vue du salut personnel, le sacerdoce ordonné n'est pas un "avantage" ou un passe-droit.
En un mot, les femmes ne sont privées de rien de ce qui constitue les biens recherchés par les chrétiens ni des moyens pour y parvenir. Dans ce contexte, la division des rôles, intégrant la distinction des sexes n'est pas discriminatoire. J'insiste sur le "dans ce contexte" car, aujourd'hui, beaucoup n'accepteront pas cette explication, allant jusqu'à faire un procès d'intention à l'Église de servir de cet "argumentaire" pour maintenir les "simples fidèles" dans l’obéissance passive. À un certain point il faut faire un choix, on accepte ou pas de ne pas tout regarder dans une logique de domination, on accepte ou pas de voir les choses selon Dieu.

Pour finir sur ce point, je voudrait juste préciser un dernier aspect : si les femmes n'ont pas le doit d'être ordonnées, les hommes non plus. 
Il n'existe tout simplement pas de "droit" à l'ordination dans l'Église. Combien d'hommes ont souhaité, désiré et voulu devenir prêtres qui se sont faire dire non.
Un catholique croit que l'appel vient de Dieu et que c'est l'Église qui à l’autorité d'authentifier cet appel. Ne pas le croire nous place dans l'impossibilité de devenir prêtre car le prêtre, s'il est un ministre de Dieu, est également un ministre de l'Église, qui a la responsabilité de croire ce que l'Église croit et d'enseigner ce que l'Église enseigne et cela qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme.
Encore une fois, reconnaître la cohérence de cet enseignement ne signifie pas croire à cet enseignement. On peut ne pas être catholique et reconnaître que le fait que l'Eglise réserve l'ordination aux hommes appelés ne constitue pas une discrimination.

Toujours est-il, pour en revenir à mon sujet, l'Église à toujours reconnu l'égale dignité intrinsèque de l'homme et de la femme. Cela n'a pas existé dans d'autres sociétés ou religions non-chrétiennes.
Un des lieux par excellence pour le voir est la théologie du mariage. Je ne mentionnerai ici que le fait que pour l'Eglise, le consentement des deux époux est nécessaire pour qu'un mariage soit reconnu valide. Sans ce consentement, il n'y a pas de mariage.

En conclusion

Il y aurait plusieurs autres exemples de ces valeurs chrétiennes "laïcisées" auxquelles nous sommes toujours attachés en ayant oublié qu'elle ont leur source historique dans la foi en Jésus-Christ.

C'est pourquoi ce à quoi je veux en venir, c'est l'affirmation que non seulement le contenu de la foi chrétienne n'est pas contraire à nos valeurs occidentales, n'est pas contraires aux valeurs auxquelles nous nous disons encore attaché mais que la reconnaissance de notre héritage chrétien et la reconnaissance de la valeur de l'enseignement chrétien est la seule garantie de la préservation, dans nos sociétés, de ces valeurs que nous voulons défendre.

À l'opposé, ne pas reconnaître cet héritage et sa valeur, demeurer dans l'illusion que les différentes religions se valent et s'équivalent, nous condamnera nécessairement à commettre l'erreur de se laisser progressivement envahir par des cultures et des valeurs qui sont à l'opposée de ce à quoi nous disons encore tenir.

Un état qui refuse de reconnaître un ordre qui le dépasse deviendra nécessairement tyrannique. C'est de Dieu que vient la liberté. 
Comment une fraternité qui ne s'enracine pas dans une paternité commune pourrait-elle être plus qu'une image romantique, un rêve ? Dieu n'est Père que pour les chrétiens (il est Père de tout homme, mais seul les chrétiens le reconnaissent comme tel).
C'est parce que nous sommes l'objet d'un même amour que nous sommes radicalement égaux car, pour ce qui est du reste, la nature ne nous montre jamais d'égalité. Cette notion d'une égalité universelle n'existe que dans le christianisme.

Le seul salut de notre civilisation (ou de ce qu'il en reste) et la seule manière de retrouver un amour de ce que nous sommes qui nous redonnera la force de s'affirmer devra passer par une profonde réconciliation avec notre passé et notre héritage chrétien car c'est de là que nous sommes nés.
Il ne s'agit absolument pas de se croire parfait, l'histoire montre que nous ne l'avons jamais été. 
Comme le disait déjà saint Paul, "c'est dans des vases d'argile que nous portons notre trésor".
L'amour de ce que nous avons reçu, de ce que nous sommes, ne signifie en rien l’orgueil de se croire supérieur. À l'inverse, l'auto dénigrement n'a rien de la vertu d'humilité.

1 commentaire:

  1. Texte intéressant en ce qu'il montre que plusieurs des semences de l'enseignement de Jésus, vécues d'abord par les églises (égalité des sexes et des races devant Dieu le Père, laïcité, mariage consensuel, justice sociale) font maintenant tellement partie de la culture d'aujoud'hui qu'on oublie d'où elles viennent.

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